Droit des brevets

17 mai 2010
Par: Benoît TROUVILLIEZ

Introduction

Cet article inaugure la catégorie sur la propriété intellectuelle et industrielle par le droit des brevets. Nous y verrons notamment ce qu’est un brevet et ce que cela implique d’en déposer un. Afin de faciliter les choses, nous considérerons que sauf mention du contraire, nous nous intéresserons par la suite aux brevets français (ceux aux États-Unis étant légèrement différents).
Le but de cet article est de présenter de manière la plus claire et la plus succincte possible la “base” du droit des brevets.

Qu’est ce qu’un brevet?

Tout d’abord, définissons ce qu’est un brevet. Un brevet est un monopole accordé à un déposant vis à vis d’une technique, d’un procédé qui soit à la fois nouveau et innovant par rapport à l’existant dans le domaine. Dans le langage scientifique, on appelle cet existant “l’état de l’art”. Ce monopole est accordé pour une durée limitée dans la zone géographique couverte par l’organisation ayant délivrée le brevet (et non pas partout dans le monde comme on pourrait s’y attendre).

On ne peut donc pas breveter :

  • un procédé qui aurait été décrit dans l’état de l’art (et ce même par le déposant lui même) à une date antérieure au dépôt de la demande de brevet (non respect de la condition de nouveauté).
  • un procédé qui aurait déjà fait l’objet d’une demande de dépôt de brevet par un tiers ou par le déposant lui même après la divulgation/publication de ce dépôt (sauf si on est dans le cas d’une extension du brevet initial) (non respect de la condition de nouveauté).
  • un procédé qui serait “trivial” pour une personne du domaine (non respect de la condition d’innovation).

En contre partie de cette demande de monopole (et oui ! il y a une contre partie), la demande de dépôt fait l’objet d’une publication dans le Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle (BOPI), 18 mois après son dépôt. Cela implique donc qu’un an et demi après le dépôt de la demande, toute personne demandant à consulter le BOPI que ce soit via internet ou par support papier, à alors accès à la demande dans son intégralité et par conséquent à la technique que l’on souhaite breveter.
Il est également important de souligner que cette publication n’est pas soumise à l’acceptabilité de la demande, ce qui implique que même une demande non valable sera publiée après 18 mois. En fait, seul une renonciation du brevet par le déposant avant la publication dans le bulletin officiel de sa demande permet de ne pas voir cette dernière publiée.

Il est également important de comprendre qu’un brevet est avant tout un moyen de protéger une technique ou un procédé particulier en établissant d’une part une “preuve” de la date de création du procédé (date de dépôt) et de la paternité de ce procédé (déposant) et d’autre part en permettant d’interdire la “copie” de cette technique pendant toute la durée de maintient du brevet. Cette remarque est surtout intéressante dans le cadre de la reconnaissance du droit d’auteur qui sera abordé dans un article ultérieur. Un brevet doit donc être vu comme une preuve pouvant être présentée devant un tribunal en cas de litige.

Mais alors qu’est ce qui est brevetable?

C’est là que la question se complique. Selon les pays, on trouve quelques modifications par rapport à ce qui est brevetable ou non. Nous allons donc nous intéresser ici au cas français.
Comme nous l’avons vu dans l’introduction, un brevet permet à la base de protéger un procédé, une technique innovante et nouvelle. Le droit français y ajoute également les pré-requis d’être exploitable concrètement dans l’industrie, d’être une réponse technique à un problème technique et de ne pas faire parti d’une liste d’exclusion.

Liste d’exclusion (non brevetable) :

  • les théories et formules mathématiques
  • les idées non concrètes
  • les plans, principes et méthodes
  • les logiciels en tant que tel
  • et d’autres…

Plus de renseignements peuvent être trouvés sur le site internet de l’INPI en terme de brevet français. Nous verrons dans le paragraphe suivant ce qu’est l’INPI.

Qui délivre un brevet? Quel est l’étendue de couverture d’un brevet?

Les brevets sont accordés pour une période limitée dans le temps à un déposant par une autorité faisant foi pour une zone géographique donnée. Ces autorités ont la plupart du temps, une juridiction qui s’étend sur un pays. C’est le cas en France avec l’Inpi (Institut National de la Propriété Industrielle). Cependant, des autorités ayant des juridictions plus étendus existent également, notamment au niveau Européen (OEB) ou même mondial (OMPI). Il est toutefois à noter que ces “autorités étendues” n’ont en fait une portée de juridiction que dans les pays ayant adhéré à l’organisation. La liste des pays concernés est disponible sur chacun des sites internet de ces organisations.

Quel est la durée de validité d’un brevet?

Une demande de brevet valide est en général transformée en brevet dans un délai de 2 à 3 ans après le dépôt de la demande auprès de l’organisation compétente. Cependant, le brevet est réputé “valide” tant qu’il n’en a pas été prouvé le contraire. Une technique est donc protégée dès le dépôt de la demande. Cette protection est ensuite reconductible tous les ans pendant une période de 20 ans et ce tant qu’elle est réputée comme légitime. Cette reconduction est soumise au paiement de l’annuité dont le tarif est croissant chaque année au cours de la validité du brevet. C’est pourquoi, il est courant de voir des brevets reconduits uniquement pendant une dizaine d’années.

A quel moment un brevet cesse-t-il de protéger une technique?

Un brevet cesse donc de protéger une technique dans l’un des cas suivants :

  • En cas de renoncement au brevet par le déposant après demande auprès de l’organisation compétente.
  • En cas de non paiement de l’annuité.
  • En cas d’invalidation de la demande de brevet par l’organisation pour non respect d’un des critères de brevetabilité.
  • En cas d’invalidation, d’une demande ou d’un brevet établit, par une instance juridique compétente par rapport à l’organisation concernée.
  • Dans tous les cas, 20 ans après le dépôt de la demande.

Extension du brevet

Une fois la demande déposée, il n’est pas possible de la modifier et ce pour une raison assez simple : la date retenue pour le début de la validité du brevet est la date de dépôt. Si l’on pouvait modifier la demande à postériori, il deviendrait alors possible de protéger des techniques avant même qu’elles ne soient abouties.
Par contre, étant donné que chaque organisation a une portée de protection restreinte comme nous l’avons vu auparavant, il est possible de déposer une demande d’extension de la demande initiale auprès d’autres organisations afin d’étendre la zone géographique de couverture. Le dépôt de la demande de brevet auprès de l’Inpi ouvre un “droit de priorité” au déposant d’une durée de 1 an. Pendant ce délai, le déposant peut étendre sa demande de brevet dans toutes les organisations de son choix tout en bénéficiant de la date de dépôt initial. Cela veut donc dire que pendant ce délai, on ne peut ni lui opposer une divulgation de son procédé ultérieur au dépôt initial mais antérieur au dépôt étendu, ni un dépôt réalisé par un tiers. Passé ce délai, si le procédé est resté secret, il reste brevetable jusqu’à sa publication dans le BOPI, 18 mois après son dépôt (la condition de nouveauté n’étant dès lors plus remplie).
C’est pourquoi, il est important lorsqu’on choisit de déposer un brevet de déterminer dès le départ, la zone géographique dans laquelle on est susceptible de vouloir protéger la technique.
Plus de renseignements sur la protection par le droit des brevets à l’étranger peuvent être trouvés sur le site de l’INPI.

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